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introduction

Voilà 10 ans que What's up Doc vous propose le classement des CHU et des spécialités choisis par les futurs médecins.

Pour le concept, il faut bien rappeler la méthodologie : les 28 établissements et les
44 spécialités sont classés selon le rang moyen aux ECNi des étudiants qui y sont affectés pour leur internat. Le classement est établi pour l’ensemble des CHU dans chacune des spécialités mais aussi pour les spécialités dans chaque CHU. À noter, cette analyse exclut les internes du Service de santé des Armées (SSA) ainsi que ceux sous contrat d’engagement de service public (CESP), qui choisissent parmi des postes dédiés. Après cette soustraction, les choix de
8 612 étudiants ont été pris en compte pour nos calculs.

Pour cette année anniversaire, nous avons repris nos 10 classements des CHU et nos 6 derniers classements des spécialités, puisque les options de choix de spécialités ont changé en 10 ans mais sont les mêmes depuis 6 ans maintenant. Rappelez-vous, il s’agissait de distinguer toutes les spécialités chirurgicales et d’introduire des nouvelles spécialités : gériatrie, médecine d’urgence, médecine légale et expertises médicales, médecine intensive-réanimation, maladies infectieuses et tropicales et médecine vasculaire.

Cet anniversaire est aussi l’occasion de sonner le glas des ECNi qui vont devenir les EDN : Épreuves dématérialisées nationales. Une génération chasse l’autre…

C’est donc un riche dossier qui attend de retenir votre attention !

Classement 2023 des CHU
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La Bretagne est en force cette année dans le classement des CHU !
Tandis que La Réunion a été boudée par les internes.

Elodie Hervé

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Les Bretons prennent la main cette année. Le CHU de Rennes arrive en tête, après avoir pris 2 places et détrôné Grenoble ! Véronique Anatole-Touzet, directrice générale du CHU de Rennes, explique cela par « la qualité de la formation, l’intégration dans les équipes, le respect des règles de repos de sécurité entre les gardes, un travail de longue haleine ». Ce dernier a visiblement payé cette année.Le trio de tête de ce nouveau classement ?
Le CHU de Rennes, le CHU des Hospices civils de Lyon, fidèle à lui-même, et le CHU de Montpellier-Nîmes qui a gagné 3 places. Un bond qu’Anne-Lise Barral, directrice des affaires médicales, explique ainsi : « Nous avons une politique volontariste d’accueil des internes, un bel internat. Nous travaillons depuis
2-3 ans avec les syndicats sur le temps de travail des internes. Depuis 2 ans, nous travaillons également sur les astreintes non rémunérées et nous avons intégré le principe des 48 heures par semaine. Sans parler du soleil, de la plage, de la vie universitaire et culturelle
». Vous l’aurez compris, la martingale des vainqueurs de cette année est : le respect des internes ! 

En queue de classement on trouve le CHU de Reims, celui de Limoges et enfin celui d’Amiens, bon dernier. Et ce n’est pas vraiment une surprise pour son doyen, Gabriel Choukroun : 

« D’abord, à choisir entre Nice, Nantes, Bordeaux et Amiens le choix ne se tourne pas spontanément vers Amiens. Ensuite, le CHU n’a pas une taille permettant d’attirer des internes et la ville n’est pas très attractive pour les jeunes. De plus, il faut reconnaître qu’Amiens est une université où la majorité des étudiants souhaitent faire de la médecine générale. C’est très bien en soi, car la région en a besoin. Mais de ce fait, beaucoup n’ont pas une haute prétention au classement aux ECNi ».
Pour autant, ce CHU, conscient de sa position, se lance un objectif pour l’année prochaine :
« Améliorer la communication ». 

Grosse déception de l’année, le CHU de La Réunion, qui après une ascension incroyable ces dernières années, est redescendu à la 10e place, avec une chute de 6 places. Alors que le CHU de Martinique – Pointe-à-Pitre, malgré les tensions dues aux antivax, a tout de même gagné 1 place pour atterrir 15e

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Classement 2023 des spés
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Certes, la santé mentale ne va pas s’améliorer…
mais il y a foule de candidats pour poser des implants mammaires !

Albane Cousin

 

Le tiercé de tête est plus qu’attendu, presqu’immuable : la tête de notre classement reste squattée, dans l’ordre, par : la chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique, puis l'ophtalmologie et la dermatologie-vénéréologie, suivie de près par la médecine cardiovasculaire. La néphrologie gagne 2 places et se hisse dans le top five. En revanche, exit la chirurgie maxillofaciale qui en perd 2 et se retrouve 7e. Quel est le secret de la chirurgie plastique pour tant attirer ? À en croire Delphine Haddad, chirurgienne plasticienne et esthétique, membre de la SoFCPRE* : « C’est une spécialité au goût du jour, on en parle de plus en plus. Contrairement à ce que l’on pourrait croire j’ai fait de la chirurgie plastique et esthétique pour soigner. Quand on est médecin, soigner ce n’est pas simplement soigner une maladie, c’est accompagner des gens. Finalement la chirurgie plastique est l’une des spécialités où l’on soigne le plus. » Mais il y a quand même des surprises dans ce hit parade des spécialités.

 

La rhumatologie a dégringolé de 9 places, la neurochirurgie de 4, et la gastro-entérologie-hépatologie accuse une baisse de 3 places. Fidèles au poste nous retrouvons, sans changement, en fin de classement : médecine et santé au travail (bon dernier), biologie médicale (avant-dernier) précédée par médecine de santé publique. Trois spécialités mal aimées. Pour Martine Delherm, médecin au CIAMT** : « Si la médecine du travail est en bas du classement c’est parce qu’elle n’est pas enseignée pendant les études médicales, donc les internes ne savent pas ce que c’est exactement ». 

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La biologie médicale souffre, elle aussi, d’être méconnue. « Les médecins ne se rendent pas compte de toute la richesse de la discipline » explique Florence Guillotin, coprésidente de FNSIP-BM***.
« C’est l’une des spécialités qui offrent le plus de diversité de métiers. Nous n’en avons pas conscience car les stages sont faits dans les laboratoires, mais les domaines sont très variés :  de la recherche-innovation au management, en passant par l’hématologie, etc. On peut travailler au Commissariat d’énergie atomique tout autant que dans les industries de diagnostic in vitro… » Pour finir, si la santé mentale est une priorité du quinquennat, elle ne l'est pas encore tout à fait dans la tête des médecins : la psychiatrie gagne 1 place, pour pointer 40e du classement. Un espoir ?

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Notes

*Société Française de Chirurgie Plastique, Reconstructrice & Esthétique

**Centre Inter-entreprises et Artisanal de santé au travail

***Fédération Nationale des Syndicats d’Internes en Pharmacie et Biologie Médicale

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La rhumato dévale la pente
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Cette spé à la fois technique et humaine accuse un recul de 9 places. Moins excitante  ou lucrative que certaines, les enseignants défendent une discipline variée et en évolution permanente.

Isabelle Guardiola

 

23e rang, -9 places dans le classement, un rang moyen du 3075e interne au classement... Et sur le podium des CHU à l’avoir choisie, Strasbourg, Bordeaux, Toulouse. « Nous ne sommes pas inquiets quant à cette chute, la place de la rhumato dans le classement peut fluctuer, modère Bruno Fautrel, chef de service rhumatologie de La Pitié-Salpêtrière et président du Collège français des enseignants de rhumatologie (Cofer). « Les internes apprécient cette spécialité dynamique et variée et le recours au droit au remord est très limité. En revanche, il apparaît que cette spécialité est imparfaitement connue, d’où des actions spécifiques qui seront menées dans les mois qui viennent. Elle est associée au vieillissement, à l’arthrose, à la douleur et à la plainte des patients. »

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Un exercice mixte et en évolution

Et pourtant, s’y niche la promesse de carrières épanouies et riches, caractérisées par une forte dimension humaine : « Il faut interagir, parler avec le patient – et donc aimer les gens – pour comprendre ce qui se cache derrière le symptôme : du psychosomatique parfois, mais aussi beaucoup d’immunologie qui joue un rôle à la fois dans le développement des maladies inflammatoires et dans leurs conséquences ; les dernières années ont bien montré le rôle de cellules de l’immunité ou de cytokines pro-inflammatoires (neuro-inflammation) dans les phénomènes de sensibilisation centrale à la douleur, à l’origine de syndromes douloureux chroniques. Des maladies pour lesquelles un élément de rééducation sera au premier plan. On décrit souvent les internes de rhumato comme très empathiques. Nous avons également dans la spécialité une place importante pour l’imagerie, que ce soit l’échographie – le "stéthoscope du rhumatologue” – ou la densitométrie osseuse, et les gestes articulaires ou rachidiens que nous réalisons avec ou sans repérage radiographique et échographique. J’ajouterai également que nombreux sont ceux se formant à l’hypnose pour faciliter la réalisation des gestes percutanés, ce qui ajoute une corde tout à fait intéressante et originale à notre arc. »

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Le tout dans un secteur peu saturé, même à Paris, et une densité de rhumatologues à la baisse, du fait du numerus clausus. Le Pr Bruno Fautrel décrit une discipline en mouvement : « En 15 ans, l’arrivée de médicaments très puissants – immunomodulateurs ciblés – a transformé le pronostic de rhumatismes inflammatoires. Le développement de ces traitements n’a cependant pas réduit l’attrait d’autres thérapeutiques, que ce soit la rééducation ou les gestes (infiltrations, biopsies, lavages articulaires)… réalisés selon différentes techniques (scopie, écho) diagnostiques ou thérapeutiques. Nous pratiquons aussi les ostéodensitométries pour quantifier le risque de fracture chez les personnes ostéoporotiques... » À ceci s’ajoute la coordination d’équipes paramédicales (infirmière d’éducation, kinésithérapeute, ergothérapeute, psychomotricien, enseignant en activité physique adaptée...), et un travail d’équipe particulièrement stimulant. 

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Pour accompagner l’évolution de la spé, le Cofer milite pour une 5e année d’internat puisque, si l’enseignement de la prise en charge est bien couverte par les services hospitaliers, l’apprentissage des gestes techniques nécessite un temps additionnel plus facilement accessible en stage de ville. « Nous travaillons à la réalisation de stages mixtes combinant une majeure partie à l’hôpital et des demi-journées dans des cabinets libéraux », conclut Bruno Fautrel.

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St-Etienne remonte la piste
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Petit mais attractif, l’internat de Saint-Étienne a gagné 3 places au classement.
Stages, ambiance, qualité de vie : un trio gagnant.

Sophie Cousin

Lentement mais sûrement, le CHU de Saint-Étienne gagne des places au classement : 26e en 2019, 25e en 2021 et 22e en 2022. L’internat de Saint-Étienne est petit en effectifs – avec des promos de moins de 100 étudiants par spécialité – mais c’est d’autant plus facile d’y nouer connaissance dès le début de l’année.
« Il y a de l’entraide et de l’ambiance, c’est plus convivial que les internats des grandes villes », souligne Elora Gaudry, interne en psychiatrie et présidente de l’Association des internes de Saint-Étienne (AISE).

Les stages périphériques sont dans un périmètre kilométrique moins vaste que pour d’autres CHU et les internes y ont accès en moins d’une heure de route, ce qui est un gros plus par rapport à d’autres internats !
« Nous avons de très bonnes remontées de nos terrains de stage, à la fois pour la qualité de l’encadrement et pour le repos de garde, qui est majoritairement respecté partout. De toutes façons, au moindre problème, nous avons du poids en tant que syndicat pour discuter avec la direction de la Faculté, qui est à notre écoute », indique Elora.

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50 % des internes restent sur le territoire 

De son côté, le doyen de la faculté de médecine, le Pr Philippe Berthelot, se félicite lui aussi de cette bonne place. « Saint-Étienne a longtemps souffert d’une image d’ancienne ville minière, un peu triste, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui ». La ville et son CHU bénéficient aujourd’hui de nombreux facteurs d’attractivité : la proximité géographique avec Lyon (qui permet à certains internes de se former à Saint-Étienne tout en continuant de vivre dans la métropole régionale), une qualité de vie excellente pour un budget inférieur à celui de la vie lyonnaise, une faculté moderne refaite à neuf en 2015, un CHU performant avec un beau plateau technique et des terrains de stage variés et appréciés.  Signe qui ne trompe pas : plus de 50 % des internes restent sur le territoire après leur formation. La faculté de médecine a d’ailleurs décidé de travailler son image et sa communication cette année. « Nous restons modestes par rapport à notre voisin lyonnais mais nous avons décidé de mieux nous "vendre". Nous venons de recruter une chargée de communication qui va développer notre site internet et mieux faire connaître nos carrières hospitalo-universitaires auprès des lycéens. Ce sont deux de nos priorités pour 2023 », expose le doyen. Même volonté de renouveau du côté des représentants des internes. « Niveau com’, tout a été laissé en plan pendant le Covid. Nous avons relancé le site internet du syndicat l’année dernière, alors qu’il était complètement planté, peut-être que ça a redonné de la visibilité à la subdivision. On a aussi fait beaucoup de com’ auprès des externes sur le post-ECN, et on a relancé des événements type afterwork, soirées. On est au top sur l’accueil des nouveaux internes ! »

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Evolutions contrastées
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En l'espace de 10 ans, certains CHU ont bougé dans le classement tandis que d'autres  pourraient recevoir la palme de la stabilité !

Elodie Hervé

À tout seigneur tout honneur : mention spéciale pour les Hospices civils de Lyon ! C'est bien simple, depuis 10 ans, s'ils ne sont pas à la première place, ils sont à la deuxième. Yves François, président de la CME, restait pourtant modeste à notre micro l’année dernière : « Pour moi, c’est clair : ce n’est pas nous, c’est la ville ». Il est vrai qu’à Lyon les loyers sont intéressants, il y a beaucoup à faire sur le plan sportif et culturel, la situation est assez idéale, près de la montagne et pas si loin de la mer. Il est juste aussi d’évoquer des raisons en lien avec la taille du CHU. Ainsi, Yves François notait : « Pour une spécialité donnée, dans les petits CHU, vous n’avez qu’un service, et peu de surspécialités, alors qu’à Lyon, en chirurgie digestive par exemple, il y a 4 services. Certes, à Paris il y en a 20, mais la vie y est plus difficile ». D'autres lignes bougent davantage. Dans le top 3 jusqu’en 2019, ce qui lui vaut la 2e place sur 10 ans, le CHU de Nantes s’installe, cette année, à la 6e place. « Dans les groupes de futurs internes, Nantes a commencé à être décriée, reconnaît Sarah Daubresse, vice-présidente de l’ANEMF chargée des études médicales. Les agressions nombreuses et répétées ont fait peur à beaucoup de gens. »

 

En 2022, en effet, plusieurs faits divers ont fait la une des médias, dont une fusillade et un viol en réunion qui s’est déroulé dans les rues de Nantes. « Il n’y a aucun doute que ce contexte-là a joué dans les choix des CHU »,souligne Sarah Daubresse. « Personne n’a envie d’être en insécurité en rentrant d’une garde. » Côté Assistance publique, Marseille et Paris restent bien classées. En 10 ans, la Cité phocéenne a grimpé de la 12e à la 8e place. Pour sa part, Paris gagne 2 places et arrive en 9e position cette année. De son côté, le CHU d’Angers passe de la 21e place à la 13e place. Il en est de même pour le CHU Martinique situé à Pointe-à-Pitre, qui gagne 10 places (15e en 2022). « Cette géographie est aussi influencée par le nombre de places ouvertes par spécialité, continue Sarah Daubresse. Souvent il ne reste que des places aux Antilles, à Limoges et à Saint-Étienne sur les spécialités les plus choisies. Parfois ce choix constitue donc la seule solution pour faire la spé que l'on souhaite. »

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Lille, pour sa part, fait le chemin inverse et perd 5 places en 10 ans pour arriver à la 14e place. « Cette géographie de l’installation des internes va aussi se baser sur des représentations personnelles que l’on se fait de telle ou telle ville, reconnaît Caroline de Pauw, sociologue de la santé et directrice de l’URPS Haut-de-France Médecin. Là où il y a des dynamiques universitaires, les internes s’installent. Et cela va aussi permettre de dynamiser la ville. Lille est devenue une métropole, un pôle de recherche attractif et elle reste bien classée pour toutes ces raisons. »

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Le classement se referme sur les CHU de Reims, Limoges et Amiens. Ce dernier perd 8 places en 10 ans. Un triste constat commenté par son doyen, Gabriel Choukroun, en ces termes : « Le CHU n’a pas une taille qui permet d’attirer des internes et la ville n’est pas très attractive pour les jeunes. » Résultat, des postes d’internes n’ont pas été pourvus en psychiatrie, en santé publique et en médecine du travail. Un manque qui va se voir dans les prochaines années, se désole Gabriel Choukroun.

6 ans de choix
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Au fil des 6 ans de classement avec les 44 spécialités telles que modifiées en 2017, on remarque peu de grands changements. Pourquoi certaines spécialités sont-elles plus choisies que d’autres ? Est-ce un défaut de formation, de connaissance ou un désintérêt ? Éléments de réponse.

Elodie Hervé

Cette année encore, et c'est la même chose depuis 6 ans, le podium est occupé par 3 spécialités bien connues :
chirurgie plastique, ophtalmologie et dermatologie. Soit 3 choix qui assurent un niveau de vie confortable pour celles et ceux qui s’installeront après en libéral. « Ce sont des spés avec un confort de vie important après les études, souligne Sarah Daubresse, vice-présidente de l’ANEMF chargée des études médicales et également étudiante au Kremlin-Bicêtre. Ce sont aussi 3 spés lucratives », reconnaît-elle avant d’ajouter : « Néanmoins, je pense que l’argent n’est pas la seule motivation, car si tel était le cas on ne tiendrait pas 10 ans psychologiquement en études de médecine. » Sarah Daubresse souhaite, elle, s’orienter vers la psychiatrie (40e spécialité dans le classement). « C’est une spé d’avenir, même si elle semble peu attractive », assure-t-elle. Pour l’ANEMF, le choix des spécialités peut aussi s’expliquer par la manière dont se déroulent les stages et les enseignements. « Nous avons fait une étude, ajoute Yaël Thomas, président de l’ANEMF, qui montrait que quand les stages se passaient bien en psychiatrie, il y avait un regain d’intérêt après. Il n’y a aucune raison que cette conclusion ne s’applique pas aussi aux autres spécialités. » En fin de classement, médecine et santé au travail s’installe, juste après biologie médicale et santé publique. « Il serait intéressant de croiser ces données avec les données de genre, interroge Caroline de Pauw, sociologue de la santé et directrice de l’URPS Haut-de-France Médecin. Ce qui m’interroge aussi, c’est pourquoi certaines spécialités sont moins choisies ? Est-ce à cause des contraintes administratives, du rythme de travail, d’une méconnaissance de cette branche de la médecine ? Ce sont de vraies interrogations qui méritent qu’on s’y arrête si l’on veut comprendre l’image qu’en ont les futurs médecins. »

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À noter dans le reste du classement, dégringolade de maladies infectieuses et tropicales de la 3e place en 2017 à la 11e en 2022. Il en va de même pour médecine intensive-réanimation, qui passe de la 12e place en 2017 à la 25e place. Quant à anesthésie-réanimation, cette spécialité grimpe de 9 places pour atteindre le 8e rang en 2022. Peut-on y voir un effet COVID ? « Je pense que cela a pu jouer, continue la sociologue. Les conditions de travail se sont dégradées et la confiance en l’avenir aussi. Certaines spécialités ont pu perdre en attractivité. » 

Enfin, perte de 10 places d’attractivité pour anatomie et cytologie pathologique, passant de 21e à la 31e.
De son côté, la médecine interne gagne 5 places en un an (19e) pour retrouver un niveau proche de 2017 (20e). Il en est de même pour la médecine nucléaire qui passe de la 19e place en 2017 à la 12e place. Des spécialités moins connues et souvent moins mises en avant lors des études.

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Vive les EDN !
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En juin prochain, les externes de 6e année seront les derniers à passer les ECN sous leur forme actuelle. Dès le mois d’octobre, la promo suivante inaugurera une nouvelle modalité d’accès à l’internat : les EDN, qui suscitent autant d’espoirs que de craintes.

Adrien Renaud

Au sein de la profession médicale, il existe une forme de rite initiatique qui opère une transformation quasi magique : on y entre carabin, on en ressort interne. Longtemps, ce cérémonial s’est appelé « concours de l’internat », puis il a pris en 2004 le nom assez peu poétique d’« Épreuves classantes nationales » (ECN), nom auquel est venu en 2016 s’accoler un petit « i » pour signifier son informatisation. Ce moment crucial de la vie d’un médecin s’apprête à subir une nouvelle mutation : dès la rentrée 2023, il ne faudra en effet plus dire « ECNi », mais « EDN », pour « Épreuves dématérialisées nationales ». Reste à connaître les raisons d’un tel changement, et à en évaluer les conséquences pour les étudiants. « C’est une réforme que nous avons souhaitée, car le modèle actuel des ECN a beaucoup de défauts, notamment parce qu’il ne sélectionne pas les étudiants de façon très juste, explique Yaël Thomas, président de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF). On peut se retrouver avec des classements extrêmement serrés qui décident de l’avenir professionnel de quelqu'un en fonction d’une réponse à un seul item d’un seul QCM [Questionnaire à choix multiples, NDLR]. On peut par ailleurs questionner la valeur pédagogique des QCM : ils peuvent évaluer qui est capable de recracher des éléments par cœur, mais peuvent-ils évaluer qui sera un bon médecin ou pas ? »

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Ces critiques ont, de tout temps, été adressées aux modalités de sélection des internes, et les autorités avaient déjà en partie tenté d’y répondre en introduisant progressivement de nouvelles épreuves dans les ECN. On peut notamment citer les fameux DP (dossier progressif) ou LCA (lecture critique d’article) qui ont fait les délices de générations de candidats… Mais rien n’y fait. Les ECN avaient besoin d’un sérieux coup de jeune, et la réforme du 2e cycle des études médicales est censée y pourvoir en agissant sur 3 aspects de l’antique concours de l’internat : la diminution de la masse du programme à ingurgiter, l’introduction d’une évaluation des compétences des candidats en plus de l’évaluation de leurs connaissances, et l’appréciation du parcours qui les a menés jusqu’à la fatidique 6e année de médecine.

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3 domaines d’évaluation… et 13 classements !

« Au fil des années, il y a peut-être eu une certaine dérive des collèges, qui ont eu tendance à considérer qu’il fallait enseigner l’entièreté de leur discipline au cours du 2e cycle, note le Pr Benoît Veber, doyen de la fac de médecine de Rouen, vice-président de la Conférence des doyens et pilote de la réforme du 2e cycle. Nous avons donc diminué de 20 % l’ensemble du volume de connaissances à acquérir, et il faudra peut-être que l’on fasse un deuxième tour avec les différents collèges pour voir ce qui peut encore être élagué. » Mais ce prof d’anesth-réa reconnaît également que « le programme reste dense », car « il faut qu’on forme les médecins dont la France a besoin ».

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Allégée, donc, mais pas trop, la nouvelle évaluation des connaissances des prétendants à l’internat aura lieu dès le début de la 6e année, au mois d’octobre, et pèsera 60 % de leur note finale. Ce qui laisse de la place pour d’autres épreuves, jusqu’alors inconnues des carabins. C’est ainsi que les Examens cliniques objectifs et structurés (Ecos), destinés à évaluer les compétences des candidats, compteront pour 30 % du score total. Ceux-ci se dérouleront en fin de 6e année, en juin, et visent à évaluer les compétences des externes. « La sixième année sera beaucoup plus professionnalisante, les étudiants seront à temps plein à l’hôpital, et ils seront évalués sur 2 jours via des jeux de rôles sur 10 "stations" », détaille Benoît Veber. En clair, 10 mises en situation face à des acteurs jouant le rôle de patients, qui doivent être autant de « biopsies dans les compétences des candidats », ajoute le doyen. Enfin, les 10 % restants de la note finale seront attribués sur dossier, par l’examen du parcours des candidats. « Via une grille standardisée, des points seront attribués à ceux qui auront fait des UE [Unités d’enseignement, ndlr] supplémentaires, des langues étrangères, un double cursus médecine-sciences, des stages à l’étranger, etc. », énumère Benoît Veber.

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Mais pour corser l’affaire, le passage des ECN aux EDN ne se résume pas à la complexification des modalités d’évaluation. Les EDN sonnent en effet le glas du grand classement national unifié de tous les futurs internes de France et de Navarre : ces derniers seront en effet désormais référencés dans 13 classements distincts. « Nous avons regroupé les disciplines en 13 blocs : 2 pour les disciplines chirurgicales, 1 pour la médecine de l’aigu, 1 pour la biologie, etc., annonce Benoît Veber. Dans l’évaluation des connaissances, il y aura deux types d’items : les items de rang A, exigibles quelle que soit la discipline, et les items de rang B, plus pointus, exigibles dans un groupe de spécialités donné en tout début d’internat. Dans les classements des disciplines chirurgicales, par exemple, les items de rang B correspondant à ces spécialités seront plus fortement pondérés, ce qui permettra à un étudiant qui a particulièrement travaillé ces domaines d’être plus facilement classé en rang utile dans la discipline de son choix. »

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Impréparation ?

Voilà pour la théorie. Mais dans la pratique, les étudiants dénoncent la manière dont la réforme est mise en œuvre. « Au départ, la réduction de la taille du programme devait être de 30 %, et on n’y est pas », estime Yaël Thomas. Même le chiffre de 20 % avancé par Benoît Veber lui semble discutable. « On en est toujours à devoir apprendre des items de neurochirurgie qui ne seront utiles que si on veut être neurochirurgien », regrette-t-il. Mais surtout, les carabins déplorent une démarche qui comporte selon eux un trop fort degré d’improvisation. « Il y a un manque d’anticipation de la part des facs, et à 9 mois des EDN, il manque encore des points-clés qui mettent les étudiants dans des situations compliquées, dénonce Yaël Thomas. Les arrêtés ne sont pas encore sortis, l’algorithme de matching n’est pas encore développé, le contenu de la 6e année n’est pas encore défini… »

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Mais pour le représentant des étudiants, le point le plus dur reste l’organisation des Ecos. Face à la complexité de la tâche, la conférence des doyens demande en effet la simplification de cette évaluation, en faisant passer le nombre d’examinateurs de 2 à 1, ou au moins en acceptant qu’ils ne viennent pas forcément d’une fac différente de celle des candidats. Une modification qui, selon l’Anemf, pourrait rendre la procédure inéquitable. « C’est un examen qui va déterminer la vie entière des candidats, on ne peut pas se permettre le moindre biais », attaque Yaël Thomas. Et celui-ci ajoute qu’au-delà des considérations techniques, l’incertitude est un facteur de stress non négligeable pour les candidats. « Quand on avance à vue, quand les règles changent en cours de route, quand il reste tant de questions non résolues si près des épreuves, il est certain que cela rend les choses encore plus compliquées, déplore Yaël Thomas. Je ne suis pas sûr que les doyens se rendent compte de la pression que nous avons sur les épaules. »

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Climat angoissant

Il est vrai que quand on interroge les externes, l’impression qui domine est celle d’un brouillard total dans lequel il est difficile de se faire une idée de la sauce à laquelle on va être mangé. « J’ai l’impression que personne n’a d’information, que ce soit nos représentants, la scolarité, les doyens, remarque par exemple Julie Recchi, actuellement externe en 5e année à Nancy et donc concernée au premier chef par la réforme. Nous avons beaucoup de questions, et la seule chose qu’on nous répond, c’est "Ce n’est pas encore sorti", ou "Ce n’est pas encore acté". » La jeune femme, qui dit n’être « pas une grande stressée de nature », avoue qu’elle trouve le climat « angoissant ». Elle se console en se disant que tous les concurrents sont « dans le même bateau ». « C’est la première fois pour tout le monde, on sera l’année crash-test, mais j’essaie de ne pas me miner la santé avec ça », philosophe-t-elle.

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Du côté des doyens, d’ailleurs, on tient à rassurer les candidats. « C’est une réforme que les étudiants ont réclamée, on l’a lancée, et il faut la faire, rappelle Benoît Veber. C’est vrai que les EDN aboutissent à un classement et que cela engage leurs choix, mais il faut qu’ils nous fassent un peu confiance. Notre but n’est bien entendu pas de les envoyer dans le mur, et il faut prendre conscience du fait que cette promotion bénéficie systématiquement d’arbitrages plutôt positifs. » Cette parole apaisante saura-t-elle calmer l’inquiétude des carabins ? Tous ceux qui sont passés par les affres du concours vous diront que rien n’est moins sûr.

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CONCLUSION

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Un anniversaire et un "au revoir" à venir... Il ne restera qu'une année de classement des CHU et des spécialités, tel qu'il a accompagné nos lecteurs depuis 10 ans maintenant ! Nous vous aurons partagé nos analyses et reportages pendant ces années, et nous serons au RDV pour la toute dernière édition ! 

 

Une nouvelle fois, l'entrée dans le troisième cycle sera modifiée. La rédaction partage l'incertitude encore des étudiants préparant la nouvelle formule. Quoi qu'il en soit ou sera, les évaluations, les examens ouvrant l'accès au troisième cycle, constitueront toujours un passage possiblement angoissant, mais aussi stimulant, combinant choix de vie et densité de travail. De quoi en faire - pour tout médecin - des souvenirs qui sauront revenir se manifester à chacun !

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